Une naissance déclenchée…

On entend souvent parler de déclenchement, de naissance programmée, provoquée.

Parmi toutes les façons de naître, le déclenchement en est une.

De quoi s’agit-il exactement ? Qu’est-ce que ça implique ? Quels effets bénéfiques ou négatifs cela peut-il avoir sur la mère, le père, la relation parents-enfant, mère-enfant, l’enfant lui-même etc.? Peut-on le choisir ou le refuser ?

Il ne s’agit pas ici de détailler la méthode car c’est le volet médical, mais plutôt d’essayer d’envisager quelles émotions une telle naissance peut faire émerger, que ce soit du côté de la mère, du père, des parents en général ou de l’enfant. C’est aussi l’occasion d’évoquer quels mécanismes sont naturellement impliqués dans la naissance et comment essayer de les impulser quand le terme approche si l’on veut éviter la médication.

Qu’est-ce qu’un déclenchement?

Pour démarrer, nous devons d’abord expliquer un peu de quoi on parle.

Le déclenchement est donc une manière de provoquer les contractions de l’utérus en vue de faire naître l’enfant plus rapidement.

Quand l’évoque-t-on?

– Lors d’une interruption médicale de grossesse, si cela a été discuté au préalable avec les parents, il peut être proposé. La grossesse n’est pas menée à son terme, l’organisme n’est pas encore prêt à induire la sortie du fœtus, il faudra l’y aider.

– L’équipe médicale peut également le proposer s’il faut faire naître l’enfant plus tôt que prévu pour différentes raisons (un problème ou arrêt de développement ou encore la nécessité de soins qui ne peuvent être prodigués via le ventre de la mère, des difficultés dues à l’état de grossesse qui deviennent trop lourdes pour permettre à la maman de la mener à terme et qui impliquent une sortie anticipée du bébé ou encore la survenue d’une maladie chez la femme dont les traitements ne sont pas compatibles avec la grossesse par exemple).

– La date estimée d’accouchement est dépassée depuis plusieurs jours. Cette situation peut pousser l’équipe médicale à proposer de déclencher la naissance. Le délai de dépassement toléré est généralement un peu négociable.

– Dans certains pays, en Asie notamment, le déclenchement peut aussi être demandé par les parents qui peuvent ainsi choisir la date de la naissance de leur enfant (facilité organisationnelle, date fétiche, redoutée ou commune à d’autres personnes,…).

– D’autres motifs peuvent également être invoqués comme un bébé estimé trop gros, un bassin de la mère jugé trop petit, …

Quels effets le déclenchement a-t-il ?

La première conséquence est évidemment l’apparition de contractions de l’utérus assez intenses.  Pour mémoire, ce sont les contractions de l’utérus (qui est un muscle) qui étirent le col, le font se raccourcir, s’effacer et finalement, conjointement à la pression exercée par la tête du bébé (poussé lui-même par les contractions), s’ouvrir; pour laisser passer le bébé.

Pour que l’utérus se contracte, il a besoin d’ocytocine (je vous en ai parlé dans plusieurs articles, tout le monde en produit, homme et femme, quel que soit l’âge). Au moment de l’accouchement, la mère en produit naturellement en de grandes quantités pour que les contractions permettent la naissance du bébé. Dans le cas d’un déclenchement, l’équipe médicale va donc fournir de l’ocytocine de synthèse à l’organisme de la mère.

Il existe d’autres méthodes (décollement des membranes, prostaglandines,…) qui peuvent aussi être utilisées avant mais nous ne nous y attarderons pas.

Ces contractions provoquées par le déclenchement sont généralement rapides.

Pour la femme, elles peuvent être douloureuses et plus ou moins difficiles à passer car il n’y a pas eu d’arrivée progressive.

Dans la mesure où elles ont été provoquées, ces contractions peuvent également ne pas être efficaces, c’est-à-dire ne pas induire d’ouverture du col (première porte à franchir pour le bébé pour sortir de l’utérus). L’organisme n’étant pas prêt à les accueillir, il ne les utilise pas. Cela peut donc être long et nécessiter plusieurs essais.

Qu’est-ce qu’on oublie de dire aussi sur le déclenchement?

Un déclenchement peut faire peur à la mère, au père – peur des effets sur la mère comme sur l’enfant. N’hésitez donc pas à en discuter avec l’équipe médicale pour comprendre pourquoi il vous est proposé, quelle technique est envisagée, s’il y en a d’autres, dans quelle période de temps vous devez prendre votre décision, quels sont les risques dans votre cas.

En étant informé-e-s vous pourrez ainsi mieux appréhender cette solution – la peur est souvent une projection négative d’un phénomène qui nous est inconnu. Vous pourrez aussi prendre part à la décision et ne pas simplement la subir, ce qui impactera nécessairement votre façon de vivre cette décision en tant que parent et conjoint.

De la culpabilité peut aussi être ressentie très vite à l’annonce d’un déclenchement, comme si la mère se reprochait de ne pas être capable de mener sa grossesse à terme ou de ne pas accoucher d’elle-même. Le père ou la conjointe peut aussi en éprouver, s’accusant de ne pas avoir su accompagner, soutenir sa compagne suffisamment ou même « correctement ». C’est très violent et surtout totalement injuste mais, on ne contrôle pas nos ressentis.

Une tension peut également naître dans le couple sous forme de rancœur ou de colère vis-à-vis de l’autre qui n’aurait pas « fait ce qu’il faut ».

D’où l’intérêt, une fois encore d’être informé-e-s et de prendre part à la décision, d’en discuter à deux puis avec l’équipe médicale pour s’éviter des obstacles inutiles.

Pour l’enfant, que se passe-t-il ?

Il va, comme la mère, ressentir rapidement et intensément une série de pressions plutôt fortes et peu d’interruption entre elles.

C’est tout ce qu’on peut affirmer avec certitude.

Ensuite, l’imaginaire collectif et/ou parental peut aussi envisager que cette apparition soudaine provoque des difficultés pour l’enfant qui n’y aura pas été préparé. Il est d’ailleurs souvent dit que c’est le bébé qui « choisit son heure ».

En réalité, il s’agirait plutôt d’un ensemble de facteurs:

– La maturité de développement du bébé qui serait prêt à affronter la naissance qui est pour lui aussi une épreuve physique.

– La maturité du col de l’utérus qui serait aussi prêt à se ramollir, s’effacer et ensuite s’ouvrir pour laisser passer l’enfant.

– L’état psychique de la mère, prête à vivre le chemin initiatique qu’est l’accouchement, à changer officiellement de statut – il faut que l’enfant soit né pour qu’elle soit enregistrée sur le livret de famille comme étant sa mère, à vivre les changements que l’arrivée d’un bébé implique comme par exemple l’allaitement si c’est son choix, adapter ses horaires, son rythme de vie, etc.

Il peut notamment arriver qu’un accouchement estimé à une date où le-la conjoint-e est absent-e survienne finalement avant ou après pour précisément permettre à la mère de ne pas affronter seule cet événement si elle n’y tient pas. La science ne l’explique pas encore, aussi nous pourrions tout à fait envisager l’expliquer par une action de l’esprit sur le corps, comme si la mère retenait un peu plus ou provoquait au contraire un peu plus tôt l’arrivée en le désirant ardemment.

– La bonne santé du placenta et du liquide dans lequel évolue le bébé sont aussi des critères à prendre en compte.

Ce n’est donc pas seulement le bébé qui « choisit son heure » pour naître, mais bien un ensemble de facteurs favorables ou non au déclenchement naturel de l’accouchement.

Dans ce cas, peut-on choisir d’éviter un déclenchement médical ?

De la même façon que personne ne peut vous imposer de rester dans un hôpital, personne ne peut vous obliger à vivre un déclenchement. C’est une proposition de l’équipe médicale qui vous suit, un avis qu’elle émet. S’il ne vous convient pas, vous pouvez en discuter et le refuser.

Rien ne garantit en revanche qu’il n’y aura pas des conséquences, toute action a toujours sa part de risque. Informez-vous pour savoir ce qui est en jeu dans votre cas et prendre la décision en fonction.

En première intention, il est donc intéressant de savoir si les raisons qui ont conduit à cette solution sont fondées. Une deuxième salve de tests peut être demandée: nouvelle mesure du bassin s’il était en cause, nouvelle échographie pour ré-estimer la taille et le poids du bébé, nouveau calcul de datation pour vérifier le terme peuvent par exemple être des pistes.

S’il advient que la naissance doit tout de même survenir, il peut y avoir des astuces pour l’accompagner.

Déclenchement naturel

Puisqu’il y a besoin d’ocytocine, toutes les techniques connues pour en générer sont bonnes à commencer par faire l’amour. Cette première « méthode » a plusieurs avantages: l’ocytocine évidemment pour les contractions, les prostaglandines contenues dans le sperme si votre partenaire est un homme pour ramollir le col, le mouvement pour faire bouger le bébé et l’inviter à se mettre sur la « route » éventuellement.

Toujours pour l’ocytocine, la stimulation mammaire ou clitoridienne aident aussi et peuvent d’ailleurs également être utilisées pendant l’accouchement (même logique – faciliter les contractions + amoindrir la sensation de douleur grâce aux endorphines).

Vous pouvez aussi utiliser un tire-lait pour stimuler vos seins comme le recommandent certaines sages-femmes, si cela vous inspire davantage.

Parler à son bébé en mettant les mains sur le bas du ventre pour l’inviter à descendre est aussi une idée. Vous pouvez coupler cette invitation d’une lettre qui, en étant « tangible », vous permettra de réaliser que bientôt la naissance surviendra. Parfois, inconsciemment, la maman retient son bébé. Ainsi écrire, dessiner, danser, chanter peuvent être des moyens d’exprimer ce qu’on ressent et d’évacuer ce qui peut bloquer.

Consommer des dattes* permettrait également de faciliter les accouchements spontanés, soit naturellement survenus.

L’acupuncture, l’ostéopathie peuvent aussi être explorées pour aider le corps à se débloquer s’il l’est ou tout simplement lui faire comprendre qu’il est tant de prendre le chemin de la naissance.

Le mouvement est évidemment à ne pas oublier: marcher, danser, « monter sa côte » comme dit Karine Langlois (dite la Sage-femme) qui est si inspirante, préparer les affaires de bébé, finaliser son nid. Cela permettra mécaniquement d’appuyer sur le col avec le poids du bébé.

… Et si ça ne vient pas?

Si vous avez tout tenté et rien ne se profile à l’horizon, c’est peut-être tout bonnement qu’il est encore trop tôt. Tant qu’il n’y a pas de risque vital avéré, l’équipe médical accepte d’attendre encore un peu, tout est toujours envisageable. D’ailleurs, il n’est pas rare d’observer des familles chez lesquelles les femmes accouchent toujours un peu plus tard que prévu. A l’inverse, d’autres accouchent toujours un peu avant.

Chez vous, c’est plutôt comment? 🙂

*Source: Etude de 2011 publiée par le Journal of Obstetrics and Gynaecology

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